sexta-feira, 2 de julho de 2010

Les Routes du Vin : Une Tradition Prometteuse


La première route du vin est née dans le Frioul en 1963. Depuis, les voyageurs ont changé : en plus du vin, il leur faut de la culture, l’ivresse d’une émotion, un rêve, raconte "La Repubblica".

Jenner Meletti


La première est née ici, sur le vignoble de Collio, non loin de Venise, en 1963. L’“aïeule” de toutes les routes du vin fut inventée par le marquis Michele Formentini, directeur du syndicat d’initiative de Gorizia. Elle s’appela d’abord “route du vin et des cerises”, puis route du Collio. Mais, au fond, le marquis n’a rien inventé. Il n’a fait que renouveler une vieille tradition. “Nos anciens se souviennent des ‘tavernes’, appelées aussi ‘privées’. C’étaient des débits de vin, ouverts dans les maisons des paysans. On s’y arrêtait pour boire et manger des œufs durs. Mon beau-père, qui travaillait à l’hôpital de San Floriano peu avant la Seconde Guerre mondiale, se rappelle les nombreux lavages gastriques qu’il devait pratiquer. En effet, dans ces tavernes, on pouvait boire à l’heure – une, deux ou trois heures, en avalant des œufs et quelques tranches de saucisson. Mais certains ne tenaient pas le coup”, raconte Silvano Stefanutti, président de la fondation Villa Russiz, l’organisme public qui finance, grâce aux recettes du vignoble et de la cave, un ancien orphelinat devenu maison d’accueil pour mineurs en difficulté. Les tavernes restaient ouvertes du jour de la Saint-Martin, en novembre, jusqu’à Pâques et pendant les fêtes de l’été. A ceux qui réclamaient leur fermeture les paysans montraient un édit signé par Marie-Thérèse d’Autriche et on les laissait tranquilles.

“Quand elle est bien organisée, la route du vin est vraiment efficace, explique encore Silvano Stefanutti. L’important est d’offrir du bon vin dans un cadre adapté. Les gens qui viennent acheter notre vin en bouteilles sont aussi à la recherche d’un bel endroit à découvrir et d’air pur. Ils veulent de la culture, en visitant, par exemple, le château et les riches villas environnantes. Le Collio offre tout cela. Quant au vin, nos graf et sauvignon de la Tour remportent des prix un peu partout.”

Si, dans le Collio, on peut boire un verre dans des châteaux ou de riches propriétés, entre Vérone et Trente on peut déboucher une bouteille dans un fort napoléonien. Le long de la route “Terre des forts”, des caves ont été ouvertes dans ces petites forteresses. Les “tavernes” ou les “privées” font partie de l’histoire de l’Italie – du moins, d’une bonne moitié du pays. Au voyageur qui traversait la région de l’Emilie-Romagne on racontait qu’il devait, s’il avait soif, entrer dans les maisons des paysans dont les façades étaient ornées d’un branchage [le signe distinctif des “tavernes” : en italien, frasca ou branche]. Si on lui offrait de l’eau, il savait qu’il était en Emilie. Si on lui donnait un verre de vin, il était à mi-chemin entre Bologne et Imola, et se trouvait en Romagne. “Décider de faire une route, c’est facile. La faire fonctionner, c’est beaucoup plus difficile”, explique Valentino Bega, en charge de la promotion des produits du terroir de la région. “Il faut que les communes et les associations de producteurs comprennent que vendre le territoire rural représente un business pour tout le monde. Là où les choses se font dans les règles de l’art, les résultats ne manquent pas. Nous avons rassemblé des agriculteurs, des éleveurs, des artisans de l’alimentation et de petites structures d’accueil. Depuis 1999, nous avons créé onze routes et nous pouvons d’ores et déjà dresser un bilan. Là où il y a une bonne synergie, les affaires vont bien. Nous avons constaté que les débits de vin et d’huile ont augmenté leurs ventes de 40 % à 50 %, tandis que les lits occupés dans les chambres d’hôtes et agritourismes se sont accrus de 20 % à 30 %. Les routes du vin, en somme, ne peuvent pas devenir uniquement un débouché pour la vente de bouteilles. Les nouveaux voyageurs ne se contentent plus du seul produit. Ils sont à la recherche de bonnes choses, mais aussi d’une émotion. Ils redécouvrent des saveurs perdues et, avec elles, des souvenirs d’enfance. Si vous réussissez à leur procurer cette émotion, si vous les mettez à l’intérieur d’un rêve ou d’un souvenir, alors vous avez gagné.”


Courrier International; artigo originalmente publicado em La Reppubblica.

Nenhum comentário:

Postar um comentário